EDUCATEUR ET FORMATEUR VIRTUELS

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Pratiquer la pédagogie de l’intégration…oui, mais comment ?

Pratiquer la pédagogie de l’intégration…oui, mais comment ?

 

 

Pratiquer la pédagogie de l’intégration…oui, mais comment ?

 

 

  La notion de compétence est apparue dans le monde de l’éducation dès le début des années 90. Elle succède à divers courants pédagogiques notamment à la pédagogie par  objectifs qui est une pédagogie permettant de centrer l’apprentissage sur le savoir et le savoir-faire et à la pédagogie de maîtrise dont l’objectif est d’amener tous les élèves à s’approprier un certain nombre de « savoir-faire ».

 

  C’est d’ailleurs, un concept d’actualité dans beaucoup de pays dont le nôtre, concept défini par Gerard et Roegiers  comme étant « un ensemble intégré de capacités qui permet, de manière spontanée, d’appréhender une situation et d’y répondre plus ou moins pertinemment ».

 

  Elle signifie aussi « la mobilisation d’un ensemble articulé de ressources en vue de résoudre une situation significative appartenant à une famille de situations problèmes »

 

  Par ailleurs, Le Boterf le définit comme « un savoir agir, c’est-à-dire un savoir intégrer, mobiliser et transférer un ensemble de ressources (connaissances, savoirs, aptitudes, raisonnements, etc.) dans un contexte donné pour faire face aux différents problèmes rencontrés ou pour réaliser une tâche. »

 

  D’où le choix de l’approche par  compétences dans les nouveaux programmes d’enseignement et manuels scolaires, approche qui n’est nullement en rupture mais en continuité avec les pédagogies centrées sur le savoir et qui permet aux élèves de développer des compétences à l’école ainsi que des savoirs pertinents, durables et mobilisables dans leur vie quotidienne et professionnelle.

 

  Cette approche, loin de « tourner le dos aux savoirs », permet de les lier à des pratiques sociales, à des situations complexes, à des problèmes et à des projets. En d’autres termes, elle permet de donner du sens aux apprentissages, de les rendre plus efficaces, de garantir une « meilleure fixation des acquis et de mettre l’accent sur les apprentissages « clés ».

 

  Il est clair que le concept «  de compétences constitue l’un des concepts « clés » de  l’intégration des acquis. Ainsi, la pédagogie de l’intégration des acquis est une opération qui permet de rendre interdépendants divers éléments dissociés au préalable afin de les faire fonctionner de façon articulée et ce, selon l’objectif que l’enseignant se fixe. »

 

  Dans cette pédagogie, il est indispensable de mettre l’accent sur l’ensemble des activités d’apprentissage. Il en existe plusieurs mais De Ketele  en distingue cinq types qui sont les activités d’exploration, d’apprentissage systématique, de structuration, d’intégration et d’évaluation. De ce fait, tout apprentissage, qu’il soit un apprentissage d’intégration ou autre, se caractérise par une intéraction  continuelle des divers types d’activités.

 

  Par ailleurs, dans l’intégration des acquis, on retrouve trois caractéristiques essentielles à savoir, l’interdépendance des différents acquis liée à l’organisation des contenus et des disciplines, la mobilisation dynamique de ces acquis et la « polarisation » de cette mobilisation vers la résolution des différentes situations (c’est-à-dire, vers un but).

 

  En outre, dans une démarche intégratrice , les élèves ont besoin de mener pas à pas un ensemble d’apprentissages ponctuels tout en étant guidés par leur enseignant qui doit mettre à leur disposition tous les moyens nécessaires pour effectuer ces apprentissages. Autrement dit, c’est une démarche d’enrichissement permettant de compléter les pratiques habituelles de classe.

 

  C’est ainsi que le rôle de l’école ne doit plus se limiter à transmettre aux élèves des savoirs pour les restituer tels quels, mais sa fonction principale, aujourd’hui, est de leur apprendre à réinvestir ces acquis en « situation et hors situation » scolaire et delà, dans des situations beaucoup plus complexes.

 

  Il s’agit donc de réinvestissement, par les apprenants, au sein de situations problèmes à la fin d’un ensemble d’apprentissage. Ces situations sont qualifiées de « situations d’intégration », ou de situations « cibles ».

      

    -Qu’est-ce qu’une situation problème ?

 

   La situation problème est une situation d’apprentissage et une stratégie d’enseignement favorisant l’engagement des apprenants. Elle est une tâche globale, complexe et signifiante.

 

   Globale car elle est située dans un contexte avec des données initiales, elle vise un but déterminé, elle requière plusieurs actions et elle pourrait être décomposée en plusieurs parties. Complexe puisqu’elle fait appel à diverses connaissances, elle amène un conflit cognitif où la solution n’est pas toujours évidente mais elle présente un défi à la portée des élèves, c’est-à-dire, un défi réaliste et réalisable. Elle peut toucher à plusieurs objectifs du programme, elle est donc très structurée sur le plan didactique étant donné qu’elle est élaborée en fonction d’un apprentissage précis. Signifiante, enfin, car elle a un sens et fait appel à quelque chose que les apprenants connaissent déjà ; en d’autres termes, elle est en lien avec la réalité (leur vie quotidienne).

 

    Pour X. ROEGIERS, de manière générale, une situation-problème « désigne un ensemble contextualisé d’informations à articuler, par une personne ou un groupe de personnes, en vue d’exécuter une tâche déterminée, dont l’issue n’est pas évidente à priori ». Sur le plan pédagogique, il précise qu’elle est au service des apprentissages et que c’est à travers un ou plusieurs obstacles que les élèves doivent surmonter que de nouveaux apprentissages se réalisent.  Schématiquement, il la présente comme suit :

 

 

   Un sujet, un contexte-----------------  un ensemble contextualis

      situation               ----------------      d’information à articuler par

                                                               une personne ou un groupe

                                                               de personnes en vue d’une tâche à 

 obstacle, une tâche  à accomplir,           accomplir dont l’issue n’est pas  évidente a priori

                  

 des informations

 

 

  problème                                                     situation- problème

 

 

* Selon P. MEIRIEU :

          

               -         Le sujet est orienté par la tâche, le formateur par l’obstacle.

              

                -Le franchissement de l’obstacle doit représenter un palier dans le développement          

                cognitif du sujet.

 

                -L’obstacle est franchi si les outils, les supports fournis et les consignes données  

                 suscitent   l’opération mentale     requise.

   

               -Pour effectuer une même opération mentale, chacun doit pouvoir utiliser une stratégie différente.

     

            -La conception et la mise en œuvre de la situation problème doivent être réguliers par un ensemble   de dispositifs d’évaluation.

 

          D’après lui, ce n’est, donc, pas une « pédagogie de la réponse » mais une « pédagogie du  problème. »

          

           *Selon J. P. ASTOLFI : 

 

-Une situation problème est organisée autour du franchissement d’un obstacle par la classe, obstacle préalablement bien identifié.

 

- L’étude s’organise autour d’une situation à caractère concret, permettant effectivement aux  élèves de formuler hypothèses et conjonctures. Il ne s’agit donc pas d’une étude épurée, ni d’un exemple « ad hoc », à caractère illustratif, comme on en rencontre dans les situations classiques d’enseignement (y compris en travaux pratiques).

 

- Ils perçoivent la situation qui leur est proposée comme une véritable énigme à résoudre, dans laquelle ils sont en mesure de s’investir. C’est la condition pour que fonctionne la dévolution : le problème, bien qu’initialement proposé par l’enseignant, devient alors « leur affaire ».

 

-Ils ne disposent pas, au départ, des moyens de la solution recherchée en raison de l’existence de l’obstacle qu’ils doivent franchir pour y parvenir. C’est le besoin de résoudre qui les conduit  à élaborer ou à s’approprier collectivement les instruments intellectuels qui seront nécessaires à la construction d’une solution.

 

-La situation doit offrir une résistance suffisante les amenant  à y investir leurs connaissances antérieures disponibles ainsi que leurs représentations, de façon à ce qu’elle conduise à leur remise en cause et à l’élaboration de nouveaux apprentissages.

 

-Pour autant, la solution ne doit pourtant pas être perçue comme hors d’atteinte pour eux, la situation problème n’étant pas une situation à caractère problématique. L’activité doit travailler dans une zone proximale, propice au défi intellectuel à relever et à l’intériorisation des règles du jeu.

 

-L’anticipation des résultats et son expression collective précèdent la recherche effective de la solution, le « risque » pris par chacun faisant partie du « jeu ».

 

-Le travail de la situation problème fonctionne, ainsi, sur le mode du débat scientifique à l’intérieur de la classe stimulant les conflits sociocognitifs potentiels.

 

-La validation de la solution et sa sanction n’est pas apportée de façon externe par l’enseignant, mais résulte du mode de structuration de la situation elle-même.

 

-Le réexamen collectif du cheminement parcouru est l’occasion d’un retour réflexif, à caractère métacognitif ; il aide les élèves à conscientiser les stratégies qu’ils ont mises en œuvre de façon heuristique, et à les stabiliser en procédures disponibles pour de nouvelles situations problèmes.

 

   Enfin, il faut préciser que la situation problème, comme cela a été déjà signalé précédemment, contient des données initiales précisant le contexte tout en étant utiles pour la résolution du problème. De plus, dans chaque situation problème, il y a un but à atteindre qui est différent de l’objectif d’enseignement, but qui donne un sens à la mobilisation et à l’organisation des connaissances et des acquis par les élèves.

 

    Cependant, il ne faut pas ignorer qu’elle présente des obstacles à surmonter, obstacles exigeant une réorganisation des pré requis et de là, les élèves sont amenés à trouver d’autres moyens, donc à acquérir des apprentissages. Enfin, la démarche et la solution ne sont pas évidentes, ils doivent effectuer une recherche cognitive active pour savoir comment procéder.

 

      Dans une pédagogie de situation problème, le rôle de l’élève est donc de s’impliquer, de participer à un effort collectif pour réaliser un projet, par la même occasion, de nouvelles compétences. Il est invité à faire part de ses doutes, à expliciter ses raisonnements, à prendre conscience de ses façons de comprendre, de mémoriser, de communiquer. On lui demande en quelque sorte, dans le cadre de son statut d’élève, de devenir un  praticien réflexif . C’est ainsi que cette pédagogie lui permet de faire de réels apprentissages en le plaçant au cœur du processus d’apprentissage ; elle sollicite son engagement et devient davantage acteur puisqu’il mobilise ses acquis.

 

Exemple de situations problèmes

 

     A travers cet exemple de problème de robinet et situation problème de robinet, on essaye de dégager quelques caractéristiques opérationnelles de la formulation de la situation problème par rapport à celle d’un problème traditionnel.

 

     Énoncé du  problème traditionnel (problème de proportionnalité)

 

      Le robinet de la salle de bain coule en permanence avec un débit de 1, 5 litres à l’heure.

 

     Quelle sera la dépense totale en eau de la famille sur une période de trois mois, en sachant que le prix unitaire du mètre cube d’eau est de 6, 30 DA pour les 25 premiers mètres cubes. La consommation d’eau de cette famille est de  mètres cubes ?

 

      Enoncé de la situation-problème

 

     Cette famille a reçu sa facture d’eau  montrant une forte consommation  Ceci a provoqué la colère de tous pensant que ce n’est qu’une simple erreur. Après réflexion, on  se demande si on n’est pas responsable de cette consommation très élevée et  si la cause ne revient pas au robinet qui coule goutte à goutte.  Si c’est le cas, il faudrait  faire  une réparation. 

 

      Essaye d’aider cette famille à prendre la meilleure décision. A-t-elle intérêt à réparer son robinet ? En faisant ses calculs, elle constate qu’avec ce qu’elle perd, elle pourrait remplir un bidon de 36 litres par jour. De plus,  la réparation du robinet lui a coûté cher. Aide-toi de la facture ci-dessus.

 

Aurait-il d’autres raisons qui pousseraient cette famille à réparer son robinet ?

 

          -Voici quelques caractéristiques de la formulation de la situation problème,  

            Selon   X.  OEGIERS :

 

-« On met en évidence l’enjeu de la situation, « le  pourquoi » de résoudre la situation : économiser l’eau, en réparant un robinet qui coule.

 

-On amène l’élève à se mettre dans la peau de celui à qui se pose le problème, la situation est racontée sous la forme d’une histoire.

 

-Les valeurs sont présentes : dans cet exemple, respecter l’environnement en économisant l’eau.

 

-La situation est ouverte, il ya une discussion possible (…) .

 

-On se base sur des documents authentiques.

 

-Les savoirs et savoir-faire à mobiliser ne sont pas connus au départ, mais sont à retrouver par l’élève (on ne dit pas qu’il s’agit d’un problème de proportionnalité) .

 

-Le langage utilisé est un langage plus direct.

 

-On évite de présenter l’énoncé sous la forme d’un « pavé » unique. La situation se décline en différents morceaux, avec des phrases courtes.

 

-Des données parasites sont introduites, pour rejoindre autant que possible une situation naturelle. Ici, les données parasites sont certaines données présentes sur la facture.

Il faut voir ces caractéristiques davantage comme des indices d’un état d’esprit adopté par celui qui didactise la situation que comme des caractéristiques devant être obligatoirement présentes pour pouvoir parler de «  situation problème ». »

 

Références :

Quel avenir pour les compétences ? de Christine Bosman, François-Marie Gerard Xaviers Rogiers,(Eds) .

Des situations pour intégrer les acquis scolaires de Xaviers Roegiers, ed de boeck .

Une pédagogie de l’intégration de Xaviers Rogiers, ed. boeck. 

Les compétences à l’école  de Bernard Rey, Vincent Carette, Sabine Kahn, ed. de boeck,

Doduments du  net.

                                                      

                                    Par Mme Belanteur Aicha et Melle Boukertouta

                                                                          Revue Educateur N°5



25/08/2008
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